Les Pèlerins d'Yssel

Les Pèlerins d'Yssel

dimanche 23 mars 2014

La Vallée Secrète : un passage vers l'Au-delà.


     Dans les Pèlerins d'Yssel existe un lieu créé par magie pour protéger le monde des vivants de celui des esprits et des morts : La Vallée Secrète. Fondée autour des âmes de deux sorcières elfes jumelles, cette antichambre de l'Au-delà abrite une puissance terrible et d’indicibles dangers pour les voyageurs mortels. Quelques êtres désespérées se risquent pourtant à rencontrer les Gardiennes, espérant follement qu'elles leur permettent de revoir une dernière fois l'être aimé. Oui, car il faudrait être désespéré pour vouloir se risquer dans ce lieu suspendu entre le monde mortel et le monde surnaturel. Fou, désespéré, ou contraint d'y pénétrer par un ennemi redoutable...
     " Entendant le portail magique se refermer, Livie arrêta Cœur-Louve. Quelques secondes plus tard, Argân la dépassa et les guida, Serth et elle, sur un chemin qui, depuis un contrefort montagneux, descendait dans la Vallée Secrète. Il leur restait en effet une bonne heure de route avant de rejoindre Cixie. Prudent, le lunarel n’avait pas fait œuvre de magie dans la Vallée en elle-même. Mais celle-ci était pourtant si proche que la nature commençait à ployer sous son influence. Au fur et à mesure de leur avancée, la végétation rapetissait et se solidifiait insidieusement. Les arbres se recroquevillaient vers le sol, jusqu’à devenir des buissons. Lorsqu’ils atteignirent le fond du vallon, le ciel apparut et déploya sa tapisserie d’étoiles. La nuit était tombée si vite qu’on aurait pu croire qu’elle était éternelle en ce lieu maudit. Les buissons se fossilisèrent jusqu’à ressembler à des rochers. Ces derniers, sculptés par un vent absent et créatif, semblaient vouloir fuir. Ils avaient des formes fantastiques, éclatées comme des druses de cristaux, scintillant et tranchant comme des épées. Il n’y avait plus d’herbe, juste de la roche et du sable gris qui scintillaient à la lumière d’Yssel. Se découpant, toutes noires sur le ciel indigo, des montagnes aux pentes abruptes encadraient le trio. Le cheval de Serth hennit. Aucun écho ne résonnait entre ces murailles naturelles, plus abruptes encore que les pentes des Ravins-Argent. L’air y était lourd comme sous un voile. Livie et la médusienne avaient l’impression d’être de petits insectes se faufilant entre les mailles d’une étole de soie. Argân leur fit rejoindre un large sillon qui les mena jusqu’au but de leur voyage ; la pierre à cet endroit était polie et craquelée comme la surface d’un vieux miroir. Un courant magnétique se faufilait entre les sabots des juments dont les jambes, à chaque pas, s’éclairaient de rares étincelles bleues. La lumière d’Yssel palpitait au raz du sol avec les grains de sable épileptiques. La main sur la garde de la rapière en elférium, Livie observait les alentours, le cœur serré par une douloureuse sensation de déjà-vu. Après sa chute de cheval, six années plus tôt, son âme était entrée là pour rejoindre les Portes de la Vallée Secrète. Le danger ici était réel. A la lumière d’Yssel, les âmes errant par ici pouvaient se matérialiser et agresser les voyageurs de leurs supplications ou de leurs ressentiments. Heureusement, le maître-Mort saurait comment les apaiser. Elle inspira profondément, mais l’air avait du mal à pénétrer ses poumons. Soudain, Cœur-Louve trébucha légèrement. En ce lieu, toutes les énergies vitales s’épuisaient insidieusement. En y prêtant bien attention, et avec de l’imagination, certains rochers ressemblaient à s’y méprendre à des corps pétrifiés… Des lueurs pâles et diffuses se faufilaient d’un amas de pierre à un autre ; mais c’était peut-être bien encore un effet dû à la lumière…


 " Malgré sa vigilance et sa connaissance des lieux, Livie se laissa surprendre. Quand elle s’y attendait le moins, devant elle se dévoilèrent deux hauts pans de falaise noirs et lisses, séparés par un petit espace de ciel à peine discernable. L’entrée de la Passe aux Ames ! Mais celle-ci se trouvait encore bien loin. Ces falaises faisaient déjà partie du royaume des morts. Elles n’étaient que le reflet surnaturel d’une autre réalité qui se laissait timidement entrevoir. C’était ça, la véritable Vallée Secrète. Celle dont personne ne pouvait revenir. L’endroit que venait de traverser le trio n’était finalement qu’une sorte d’antichambre. Et entre les deux univers, il y avait bien entendu un passage. Il se trouvait là, au milieu du paysage, au bout de cet étrange sillon de verre. Immenses, massives, hiératiques, les Portes de la Vallée Secrète ressemblaient à l’entrée d’une antique forteresse elfique, sans les murs et les ruines tout autour. C’était juste un encadrement en belles pierres de marbre gris qui soutenait deux battants d’obsidienne. Le tout semblait être suspendu entre ciel et terre, maintenu debout par les rayons stellaires dans un état de grâce presque absurde. Car cette vision avait véritablement quelque chose d’incongru, autant que de solennel ; qui se serait attendu à une telle chose ? Cette construction d’une beauté épurée avait de loin un aspect des plus… inoffensifs. En se rapprochant un peu plus… Serth découvrit les inscriptions elfiques gravées dans le linteau. Un symbole solaire ornait son milieu. Mais les statues étaient le plus impressionnant. Il y en avait deux, chacune étant incrustée dans un des battants de la porte ; leurs formes féminines dépassant gracieusement de la surface du verre. Les traits de leur visage, la souplesse de leurs cheveux et le drapé de leur robe étaient si finement ciselés qu’ils leur donnaient l’impression d’être seulement endormies. Belles et figées pour l’éternité, les Llawynynes, gardiennes jumelles de la Vallée Secrète, se tenaient la main au-dessus de l’interstice, scellant ainsi l’entrée à tous les êtres vivants ou indésirables et la sortie à toutes les âmes tourmentées. Leur autre bras était replié contre elles ; la main au creux de l’estomac tenait les lourds anneaux qu’il fallait soulever et faire résonner pour faire honorer une requête. Mais seul un géant aurait pu atteindre et soulever de telles poignées."

Les Pèlerins d'Yssel, tome 2 : les Vengeurs, chapitre 25.


    Qui a-t-il de l'autre côté de ces imposantes portes ? La réponse se trouve en partie dans les Vengeurs !

    Et voici de quoi vous plonger un peu plus dans les méandres de l'Au-delà du monde imaginaire d'Adir.

 


    L'élaboration de cette Vallée Secrète tire sans doute son origine de mon expérience de mort imminente et de ma propre approche de la spiritualité et du monde invisible. On peut rapprocher ce lieu transitoire de la Vallée de la Mort, issue des textes bibliques et de certains récits de NDE. Et en cherchant plus loin, je me suis souvenue d'une autre vision, celle de l'Oracle dans le film l'Histoire Sans Fin. Nul doute que cette ambiance nocturne, ces colosses bleutés et solennels, et enfin ce paysage désertique et d'une grande sérénité, m'ont influencée.

Merci pour votre lecture.
Bonne continuation et à bientôt !

Complément de cet article ici : Esprits errants et âmes damnées...

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